Je frappe rageusement dans un caillou de ma patte droite, et je continue de marcher parmi les terres neutres sans avoir un autre but que celui de passer mes nerfs. Je gronde d'impatience, de frustration, de colère. Rien ne semble apaiser le feu qui brûle en moi, et j'ai envie soudainement de faire le mal. Peu importe comment ni contre qui, j'ai juste envie de sentir la souffrance s'élever autour de moi. Je m'approche de la forêt aux pendus, et là en son sein j'entends les gémissements de son bois. J'entends les plaintes silencieuses de ses arbres aux morts et je grogne un peu plus. Qui ose s'en prendre à la Nature sa propre mère ? Je me mets à trotter, puis je galope entre les arbres comme si j'étais poursuivi par un prédateur. Comme si j'étais une misérable proie. Si mes muscles se tendent à un rythme régulier, mon coeur lui bat à toute allure. Mes poumons s'emplissent d'air aussi vite qu'ils le peuvent pour oxygéner mes veines et mon sang court en elles aussi vite que je cours au coeur des bois. Entre les cadavres, je passe à droite ou à gauche selon que le vent les pousse vers moi ou à l'opposé. Et à mesure que les échos augmentent d'intensité, ce sont mes crocs qui se dévoilent davantage. Je frappe le sol de mes pattes comme s'il avait été un ennemi, respectant pourtant chaque pas que je fais comme face à mon supérieur hiérarchique. Je n'ai probablement aucune raison d'être en colère contre celui qui abat les arbres, mais toutes les raisons me seront bonnes aujourd'hui pour me battre. Et alors que je sais qu'il me regarde arriver, je continue de foncer dans sa direction sans feindre le moindre ralentissement. Je le percute violemment, de tout mon poids, grondant férocement alors que déjà j'amorce un demi-tour pour lui mordre l'encolure et le secouer comme un prunier. Il voulait s'entraîner ? Eh bien le voilà face à un véritable adversaire. Je le relâche et m'écarte pour lui tourner autour. Je le toise, fixant mon regard dans le sien et grondant de colère. J'attends que monsieur se décide à prendre ses responsabilités. Lâche.

Je claque des mâchoires dans le vide en visant sa gorge, son mouvement lui permettant d'échapper à l'étreinte de mes crocs puissants. Je marque un écart, reprenant difficilement mon équilibre alors que le mâle semble bien décidé à faire de moi sa future victime. Oh désolé mon pote, tu n'vas pas avoir cette satisfaction. La forêt sera ta seule victime aujourd'hui. En tant que loup de meute j'ai l'habitude des entraînements groupés. Un, deux, trois adversaire voire parfois davantage, je sais comment me défendre et comment me servir de l'autre pour l'épuiser et retourner sa force contre lui-même. Je refuse de me laisser faire, d'autant plus que je n'ai pas attaqué le premier pour me faire ridiculiser bêtement. Grondant sauvagement, je me retourne brutalement pour lui faire face et plonge dans sa direction, tous crocs dehors. Je plante mes mâchoires dans son épaule et tire de toutes mes forces avant de pousser d'un coup sec en avant pour lui faire perdre l'équilibre. Je relâche la pression l'instant d'après pour m'éloigner de lui, et bondir à nouveau. Je le chevauche en sortant mes griffes, le labourant de toutes parts en tâchant de garder mon équilibre au-dessus de lui, essayant de ne pas tomber sous ses représailles.

Par des mots, il croit peut-être m'impressionner, me faire peur. Il pense qu'il peut m'effrayer ou me pousser à faire demi-tour, à fuir. Mais je n'en fais rien. Je ne sens en moi que la rage bouillonnante et le désir de me battre, de massacrer mon adversaire avec toute la force que je pourrais abattre sur lui. Je fonds dans sa direction, lui mords l'encolure quand ses crocs se referment violemment sur ma joue. Je gronde de douleur et de colère, refusant de me laisser dominer par un solitaire trop lâche pour se battre contre de véritables adversaires. Mais bientôt, alors que je pense pouvoir prendre le dessus, je remarque que mon ennemi se déconcentre, que mes coups ont une portée bien trop grande pour la véritable ampleur de l'ennemi. Que fait-il ? Est-il suicidaire ? Il me faut plus longtemps que lui pour comprendre, pour sentir. Un grizzly grogne derrière moi, et alors que je me focalisait sur l'ennemi de ma race, je suis brutalement sorti de ma concentration pour me tourner dans la direction de son regard. Ma gueule reste entre ouverte, je suis stupéfait par la présence impressionnante de l'immense animal au pelage brun. Bordel de merde, comme il dit ... Je toise l'ourse de mes yeux cyan, l'odeur du sang a dû l'attirer jusqu'à nous. La question est de savoir ce que nous devons faire. Nous unir pour nous battre contre un ennemi commun ? Tenter de fuir chacun de son côté en espérant ne pas être poursuivi par l'énorme animal ? Je suis un loup de meute. Les loups de meute protègent leurs semblables. Ils ont habitués à défendre leur prochain, à se battre en groupe contre un ennemi plus puissant. Ils connaissent la chasse groupée, les combats à plusieurs. Je sais faire. Je sais protéger autrui.

Mais pas aujourd'hui. Tous crocs dehors, dans un grondement rageur, je fonce sur le loup sombre et le percute de tout mon poids. Je suis peut-être épuisé, mais je ne suis pas encore mort, et j'ai bien l'intention de ne pas donner ma vie à cet énorme animal qui, s'il se met à courir, ne mettre que quelques secondes à nous rejoindre. Si je peux lui donner un solitaire comme appât, je le ferais. Je suis né pour me battre et défendre les idéaux de ma meute, pas pour protéger un loup inconnu que je désirais tuer l'instant d'avant. Je plonge mes crocs dans son flanc gauche et tire de toutes mes forces, secouant de tous côtés comme si je pouvais déchirer sa chair. Je m'éloigne une seconde, le regard tourné vers le grizzly mais tous les sens dirigés vers mon adversaire précédent. Si j'ai une chance d'avoir la vie sauve, je ne la laisserais pas passer et encore moins pour épargner un solitaire. Je gronde, m'acharne sur mon ennemi premier tout en ne quittant pas le second des yeux. Et lorsque l'énorme animal se met à courir en grognant, les mâchoires grandes ouvertes, je m'écarte brutalement de mon adversaire malgré ses représailles violentes, et je prends mes pattes à mon cou. Je ne serais pas celui qui mourra ce soir. Je slalome entre les arbres à une vitesse hallucinante, la peur faisant courir dans mes veine l'adrénaline qui sauvera peut-être ma vie. Je passe à gauche, à droite, rampe sous un arbre écroulé et bondit par-dessus un autre alors que les galopades de l'ours résonnent à mes oreilles et forcent mon coeur à tambouriner puissamment dans ma poitrine. Par chance, après une course démente, je fini par me rendre compte que le grizzly n'est pas ou plus derrière moi, les sous-bois ayant probablement été mon sauf conduit. Tant pis pour la bagarre, si le solitaire n'est pas mort, j'aurais bien d'autres occasions de le croiser à nouveau.

PS : J'ai joué exprès de manière à ce que l'ours ait pu poursuivre Daren pour que Kobalt puisse fuir, ou alors qu'il ait attaqué Kobalt direct, je te laisse choisir pour ta dernière réponse